lundi 24 septembre 2012

Jamaïque 2012 : La première Marche - Montego Bay

Après le processus de guérison parmi les membres de l’équipe, nous étions prêts r entreprendre les marches.
La première marche

La première marche a eu lieu à Montego Bay. Elle était chargée d’émotion pour certains d’entre-nous, le tiers, qui pour la première fois effectuait cette démarche. Chaque marche était ponctuée par un événement historique spécifique à l’endroit où nous la faisions. Cet événement avait un lien étroit avec une situation tragique vécue par les esclaves, la lutte pour l’émancipation de l’esclavage ou la liberté de l’oppression sur le peuple après l’abolition. Nous sommes partis des docks à côté d’un champs où on nous expliquait que des centaines d’esclaves  avaient dû être enterrés là après que le navire soit arrivée avec des survivants.

A la tête de la procession se trouvait un afro-colombien, Yeison qui tenait dans sa main un bâton au bout duquel se trouvait accroché un serpent. Cela a donné lieu à quelques quolibets de part des passants qui nous accusait d’occultisme, le serpent étant pour beaucoup le symbole du Diable. David devait par la suite expliquer la relation avec notre démarche : il s’agit ici du symbole de la guérison utilisé par les professions médicale et vient de l’histoire de Moïse qui avait élevé un serpent d’airain dans le désert afin que lorsque les enfants d’Israël étaient mordus par les serpents de feux et regardent ce serpent d’airain, ils soient guéris et ne meurent pas. Néanmoins les rires et la moquerie rythmaient notre marche. Certaines personnes se montraient curieuses et parfois compatissantes. 

Nous avons fait ensuite un arrêt à la place Sam Charp, un héros du pays, avant de terminer la marche à l’Eglise Baptiste de Burchell. Sam Charp était un esclave citadin éduqué, prédicateur et diacre dans une église baptiste de Montego Bay, qui est à l’origine de la révolte des esclaves de 1831. Il a commencé une résistance passive, estimant que les esclaves ne devaient pas travailler le jour de noël. Cela conduisit à une rébellion à la suite de laquelle il fut arrêté et pendu le 27 décembre 1832. Son action fut à l’origine du projet de loi abolitionniste adopté par le parlement britannique en 1834 suivi par la proclamation en 1838 de l’abolition de l’esclavage dans les colonies britanniques.

Arrivé à l’église Baptiste, nous nous sommes adressé à un petit nombre de paroissiens ainsi que quelques badauds qui avaient suivi la procession. Tour à tour les anglais dont un devait lire une déclaration de pardon d’un représentant de l’Espagne qui n’a pas pu faire le voyage, un écossais, un français et deux africains ont présenté leur déclaration de demande de pardon à l’assemblée. Ce fut un moment mémorable, rempli émotions particulièrement lorsque les jamaïcains sont venus libérer les européens de leurs chaînes et de leurs jougs.

vendredi 21 septembre 2012

Jamaïque 2012 avec Lifeline Expedition


La mission de « Lifeline Expedition » en Jamaïque vient de prendre fin. Elle nous a permis de réaliser que la problématique des conséquences de l’esclavage et de la colonisation des peuples noirs est encore douloureuse aujourd’hui et requiert une communication délicate sur les événements qui ont pris place en Afrique et dans les Amériques. Un éditorialiste du journal JAMAICA OBSERVER commençait son papier par ces mots : « La vérité dérangeante des souffrances de la traite des esclaves africains ne va pas disparaître, pas plus que les horreurs de l’holocauste juive. Mais peut-être qu’un jour, nous abattrons les vestiges de l’esclavage et laisserons émerger la confiance en notre identité en tant que race grande et noble. » Cela montre à quel point les peuples noirs ont besoin de guérir de cet « héritage ». Mais comme c’est un héritage en commun avec l’occident, elle ne pourra se faire en dehors de ceux-ci. Pour ma part cela implique que les deux voire trois parties fassent ensemble ce voyage de retour dans l’histoire pour en guérir ensemble et sceller la réconciliation entre les peuples concernés par cette histoire douloureuse.

Nous pensons, entant que chrétiens, que la réconciliation passera nécessairement par la reconnaissance, par les descendants de ceux qui en portent la responsabilité, du préjudice causé à ce peuple, premièrement l’occident et dans une certaine mesure ensuite, les africains qui ont vendu leurs frères aux occidentaux bien souvent par cupidité, puis par une demande de pardon. Voilà pourquoi des représentants des nations concernés par ce drame humain ont symboliquement pris les jougs et les chaînes pour une marche prophétique à travers le pays.

Ces marches, sous la conduite du mouvement chrétien de réconciliation « Lifeline Expedition », avaient pour but de dire au peuple jamaïcain que nous, africains et européens descendants de ceux qui ont été à l’origine de ce drame de l’humanité, le regrettons et demandons pardon. Seuls les européens étaient enchaînés et portaient des jougs. Cela signifiait : « nous comprenons ce que vos ancêtres ont endurés à cause de nous et nous vous demandons pardon ». Les marches se faisaient en silence et dans la prière. Nos pas étaient sporadiquement rythmés par le battement d’un tamtam africain, ce qui conférait une certaine solennité à la procession, ce qui fera dire plus tard à nos frères de la diaspora, lors du dernier débriefing, que ce son raisonnait et raisonnera toujours à leurs oreille comme un rappel à leurs origines africaines. Elles se terminaient sur une place publique par une déclaration que faisait tour à tour chacun des représentants des pays d’Europe sous les chaînes et les jougs, suivies par une déclaration de l’un des deux représentant de l’Afrique. Celle-ci consistait à reconnaître l’implication des ancêtres du pays représenté dans ce commerce abjecte et ses conséquences. Elle se terminait par une demande de pardon. Alors s’ensuivaient des discussions parfois vives, souvent poignantes, mais chaque fois, le pardon était accordé et les populations visitées venaient symboliquement délivrer européens de leurs chaînes et de leurs jougs.

Les premières réunions ont été consacrées à la consolidation de l’équipe. Compte tenu de la pression psychologique et spirituelle qu’impliquaient ces marches, il était primordial que l’équipe soit soudée et solidaire. Il était nécessaire que tous les membres de l’équipe soient conscients des motivations et objectifs de celles-ci. Pour cela il était important de se connaître les uns les autres et le meilleur moyen était de se présenter en exprimant ses motivations, son cheminement dans ce processus de réconciliation. Ce fut pour moi la partie décisive dans mon engagement dans la réconciliation des peuples concernés par le commerce triangulaire. Nos coéquipiers descendants d’esclaves m’ont ému à tel point que je ne pouvais que faire corps avec cette « bataille » si nécessaire ! J’ai découvert les souffrances qui les habitent et que jusque là je n’avais compris qu’intellectuellement par mon engagement dans cette lutte pour la réconciliation. J’ai découvert des choses que je ne connaissais pas encore, malgré tous les livres que j’avais lu sur ce crime contre l’humanité, et j’étais retourné jusqu’au fond de mes tripes. Une sœur, notamment, m’a bouleversé par sa révolte contre cette histoire. Nous avons pleuré ensemble et prié les uns pour les autres. Le processus de guérison commençait parmi nous, les membres de l’équipe. Je ne m’attendais pas du tout à cela, c’était extraordinaire, voire divin ! Je compris qu’il était important que ce travail se fasse avant que nous nous engagions dans ces marches.

Sujets de prière
Les sujets de prière vont essentiellement concerner les suites de cette mission :
1°) Merci de prier pour que les marches prophétiques sur la Jamaïque aient un impact certain sur l’avenir du pays.
2°) Pour que la guérison des conséquences psychologiques, mentales, spirituelles de l’esclavage soit effective dans les cœurs des jamaïcains, bref, comme l’a dit Bob Marley, qu’ils soient libérés de la mentalité d’esclave.